Tu n'es pas encore partie ? [Kouhei] {22/06/1002} TERMINÉ

Les cérémonies étaient enfin terminées. Votre père pouvait reposer en paix, même si au fond, tu t'en moquais bien. Qu'il aille en enfer, cela t'était égal. Ce qui t'énervait au plus haut point, c'était Gyokuen. À la fois ton ancienne tante et, également, belle-mère. Cette dernière s'était proclamée Impératrice. Sauf que ce titre revenait de droit à ton frère aîné, Kouen, et à personne d'autres! Comment osait-elle? Ton poing s'abattit violemment contre l'un des murs des couloirs. Il n'y avait que tes hommes à tes côtés, les seuls à qui tu montrais ces moments de colère. Tu n'étais pas du genre à perdre ton sang-froid, mais là, c'était trop. Yue, à la fois ton garde-du-corps et ton allié le plus précieux, s'approcha de toi. Il voulait te calmer. Tu le savais en entendant le son de sa voix. « Kouhei-sama... » Un ton inquiet, un ton qui se voulait pourtant rassurant. Toujours dos à lui et aux restes de tes hommes, tu levas la main pour l'empêcher de poser une main sur ton épaule. « Préparez nos affaires. Nous partons demain, à l'aube. » Ta voix était tranche et ferme. Tu avais besoin d'être seule et leur donner cet ordre était le meilleur moyen de t'en débarrasser. Même Yue ne pouvait de désobéir, au risque de te mettre davantage en colère.

Désormais seule dans les couloirs, tu soupiras longuement, essayant de retrouver ton calme. C'était frustrant, mais tu ne pouvais rien y faire. Tu devais laisser les choses suivre son cours. Si Kouen désirait renverser Gyokuen et qu'il t'en donnait l'ordre, tu n'hésiterais pas à l'anéantir. Même si tu devais en payer le prix de ta vie. Ton esprit divergea alors que tu marchais silencieusement dans les couloirs. Tu pensas à Kouha... Encore une fois, il t'évitait. Depuis qu'il avait pleuré, depuis qu'il s'était ouvert à toi, il t'évitait comme la peste. Tu décidas d'aller le voir. Après tout, tu partais le lendemain, dès l'aube, pour Wa. Tu ne pouvais te permettre de rester plus longtemps, malheureusement.

Ce fut pour cette raison que tu te dirigeais vers ses appartements. Les servantes te laissèrent entrer même si elles semblèrent quelque peu réticentes. Est-ce que Kouha leur avait dit de ne pas te laisser approcher? Tant pis. Tu avais déjà atteint le salon où ton jeune frère semblait se reposer. « C'est donc ici que tu te cachais, Kouha. Toujours en train de m'éviter, à ce que je vois. » Voilà les premières paroles que tu prononças dès que tu ouvris la porte et que tes iris bleutés se posèrent sur lui. Franche et directe, comme toujours. Tu te rapprochas de lui, mais tu gardas tout de même une certaine distance entre vous, restant même debout. Une main sur ta hanche, un léger sourire moqueur sur les lèvres, tu lui posas une question. « Je peux te parler ou tu vas encore fuir? »

Fuir... Tu savais pertinemment que Kouha n'était pas un lâche, mais quand il était à tes côtés, il désirait d'éviter. Cela te brisait le coeur à chaque fois. Tout ce que tu pouvais faire, c'était de le confronter, d'aller vers lui et de tendre ta main. Tu savais qu'en parlant de fuir, il réagirait, car ta simple présence ne semblait pas le préoccuper plus que cela, lui qui fixait toujours le plafond. Mais à l'entente de ce mot, il se redressa afin de la fixer. Une corde sensible on dirait. Tu continuas de le fixer, mais aucun son ne franchit tes lèvres. Tu ne répondis même pas à sa question. Devais-tu vraiment avoir une raison pour venir lui parler? Un faible soupire s'échappa de ses finies lèvres. Kouha était décidément exaspérant.

Toujours debout, tu attendis. Ce n'est que lorsqu'il déclara que tu devais faire vite, car il avait des choses à faire, que tu réagis. Un sourire s'étira sur tes lèvres. « Oh? Vraiment? Pourtant, avant mon arrivée, tu ne semblais pas si occupé que cela. Étrangement, tu trouves toujours une raison pour éviter de passer du temps en ma compagnie. » Tes pieds foulèrent le sol du salon, s'avançant ainsi jusqu'au fauteuil où tu t'assis. Les jambes croisées, un bras appuyé sur l'accoudoir, tu déposas ta tête sur ton poing fermé. En aucun instant, ton regard azuré ne le quitta. « Ne t'inquiète pas, je ne resterai pas très longtemps. J'ai des choses à faire également. » Après tout, tu devais préparer ton long voyage pour ton retour à Wa. Sauf que tu espérais ne pas faire ce voyage seule. Enfin... Il y avait tes hommes, mais tu espérais pouvoir avoir un membre de ta famille à tes côtés. C'est-à-dire Kouha. Si tu étais ici, c'était avant tout pour lui annoncer ton départ, mais également pour lui proposer de venir chez toi. Tu ignorais s'il allait accepté, mais le pire qui pouvait arriver était qu'il refuse.

Tes yeux explorèrent finalement la pièce dans laquelle tu te trouvais avant de se poser sur le jardin. Tu le contemplas un moment, silencieusement, avant de prononcer ces quelques paroles. « Je quitte Rakushou demain, à l'aube. Je suis simplement venue t'annoncer cela... » Encore une fois, tu allais quitter ta famille, tes frères et tes soeurs que tu appréciaient, pour aller rejoindre un époux dont tu n'étais pas amoureuse et ton fils, la chair de ta chair. Un bien pour un mal. Tu ignorais, d'ailleurs, quand tu reviendrais. « Mais je suis également venue pour te proposer quelque chose... » Ta voix s'était adoucie. Moins franche, moins directe. Tu lui laissais un certain temps pour qu'il assimile ces informations. Tu te redressa finalement sur ton siège, tes iris balayant la pièce jusqu'à ce qu'ils se posent sur ton petit frère. Ton sourire était sincère, doux et léger. « Accepterais-tu de m'accompagner à Wa? » Il n'avait jamais mis les pieds dans cette région. Tu voulais lui faire découvrir cet endroit qui t'appartenait désormais. Lui montrer où tu vivais, ce que les habitants de Wa faisaient pour ton époux. C'était un endroit agréable, même si tu avais encore du mal à t'adapter au climat pour froid. Comment allait-il réagir à ta proposition? Seul le Destin pouvait le prévoir...

Tu étais assise, un sourire planant sur tes lèvres, et tu attendais patiemment la réaction de Kouha qui ne se fit guère attendre. En premier, il se figea. Il ne semblait pas s'attendre à une telle chose. C'était compréhensible après tout. Il t'avait évité tout ce temps et voilà que tu lui proposais de t'accompagner. C'était plutôt surprenant et déstabilisant en soi. Kouha se redressa brusquement, mais tu ne bougeas même pas. Tu te contentais de le regarder, écoutant simplement ce qu'il avait à te dire. Il ne pouvait pas, il avait des responsabilités et Kouen avait besoin de lui. Autrement dit, il refusait. Ou plutôt, il t'évitait encore. Tu étais presque certaine qu'il pourrait se libérer quelques jours. Et puis, tu en avais parlé avec votre frère aîné quelques heures auparavant. Kouen était resté plutôt indifférent à la possibilité que le troisième prince puisse partir. Autrement dit, ton jeune frère pouvait faire ce qu'il désirait : rester ou bien t'accompagner. Cette décision lui revenait.

Tu restais silencieuse, l'observant s'agiter comme jamais auparavant. Il finit par s'asseoir à nouveau, déclarant qu'il ne pouvait pas. Un faible soupire s'échappa alors de tes lèvres alors que tu passas une main sur ta nuque. « C'est dommage, j'aurais vraiment aimé de montrer Wa... Surtout que Kouen-nii-sama m'a permis de t'emmener avec moi... Enfin, si tu le désirais, mais puisque tu es occupé... » Tout en prononçant la dernière phrase, tu te levas. Voulais-tu le faire sentir coupable? Non, pas vraiment. Voulais-tu le faire céder? Cela oui cependant. Surtout que leur frère aîné était en quelque sorte d'accord. C'était un argument à ton avantage. À voir si c'était suffisant pour convaincre Kouha.

Tu te rapprochas alors de lui, te penchant même vers l'avant pour que vos visages ne se retrouvent qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. Tes iris bleus plongèrent sans hésitation dans ceux rosés du plus jeune. « Tu devrais prendre quelques jours de congés, Kouha. Je suis sûre que cela te ferait du bien de te reposer un peu. » Un nouveau sourire illumina ton visage alors que tu tapotais doucement la tête du prince. Tu te redressas peu de temps après, le surplombant de ton corps qui semblait frêle et pourtant si solide. Tu haussas alors les épaules et dévia légèrement le regard, comme si tu étais te sentais blessée par les propos qu'il avait prononcé plus tôt. Il n'avait pas de temps à accorder à sa soeur aînée, c'était tout de même blessant, non? « Mais bon, tu es occupé et je ne peux rien y faire » Lentement, mais sûrement, tu commenças à reculer pour le laisser respirer. Tu pouvais ainsi observer ses réactions. Au fond de ton coeur, tu espérais sincèrement qu'il cèderait, qu'il accepterait de t'accompagner. Sauf que tu ne pouvais pas non plus le forcer. C'était sa décision, après tout, et tu la respecterais. S'il refusait, tu n'aurais qu'à le lui proposer une prochaine fois. Ce n'était pas plus grave que cela.

Tu t'étais reculée afin d'observer les réactions de ton jeune frère. Tu désirais vraiment l'emmener avec toi, passer un peu de temps ensemble, en famille. Sauf que tu avais seulement l'impression qu'il te donnait des excuses pour t'éviter. C'était cela le plus blessant, qu'il ne veuille pas être avec toi. Qu'il t'évite. Qu'il te fuit. C'est alors qu'il soupira avant de se lever afin de te faire face, disant une fois de plus qu'il ne pouvait pas. Étrangement, à voir cette lueur de détermination qui brillait dans le regard de Kouha, tu compris rapidement qu'il ne pouvait pas. Vraiment pas. Et tu n'allais rien pouvoir y faire. D'accord, très bien, tu allais te résigner. Cependant, tu ne t'attendais pas à ce qu'il te donne enfin la véritable raison.

Tout ton corps se figea et une expression de surprise s'afficha sur ton visage. Il devait s'occuper... de quelqu'un? Tu étais intriguée. Tu désirais vraiment savoir de qui il s'agissait, mais c'était inutile. Tu savais bien qu'il ne te le dirait pas et puis, tu préférais ne pas trop t'imposer. Si un jour Kouha désirait t'en parler, il le fera. Les traits de ton visage s'adoucit et un sourire s'étira sur tes lèvres. Tu ne semblais pas fâchée ni déçue. Au contraire, le prince t'avait dit la vérité. Tu le ressentais au fond de ton coeur. Et puis... Il y avait ce sourire triste, ce regard mélancolique... Cette personne devait être importante pour lui. Tu ne comprenais pas exactement le lien qu'il y avait entre eux, mais tu ne le questionneras pas sur le sujet.

Il te dit alors qu'une autre fois, il viendrait. À tes yeux, il s'agissait d'une promesse. Et il avait intérêt à la tenir! Sinon, c'était toi qui allait venir le chercher de force. Toujours souriante, mais tout en gardant une certaine distance, tu lui répondis finalement. « D'accord, je comprends... Tu aurais dû me le dire plus tôt, je n'aurais pas insisté autant. » Il était temps pour toi de rejoindre tes hommes et te finaliser les derniers détails pour ton départ. Cependant, tu désirais lui dire au revoir. Tu te doutais bien qu'il ne se laissera pas faire si tu lui faisais un câlin, alors tu optas pour une autre solution. Tendant la main vers lui, tu lui donnas une pichenette sur le front. « Tu as intérêt à venir bientôt. Sinon, c'est moi qui vint te chercher, que tu le veuilles ou non! » déclaras-tu tout en tournant les talons et en t'éloignant vers la porte. Ta main se leva afin de le saluer alors que ta tête était légèrement tournée vers lui. « Prend soin de toi, petit frère. »