Non, je ne veux pas de partenaire. (PV Yin-chan)

Une journée se termine alors que la nuit se profile à l’horizon. Ta nuit. Une journée bercée par tant d’ennui, comme habituellement. Maintenant commence l’amusement. Ton quotidien débute. Et comme toujours, tu revêts ta cape en tissus ébréché par-dessus tes vêtements. Tu sors de ton médiocre appartement. Une fois dehors, la douce brise t’étreins doucement, débutant une valse effrénée avec tes longues mèches d’un blanc transperçant l’obscurité déjà présente. Les étoiles étincelantes illuminent le ciel, éclairant de leurs auras bienveillantes, la ville endormie. Ton regard dénué de sentiment se porte vers celles-ci mais, ton sourire n’en demeure pas moins neutre.

Et dans un élan de détermination, tu mets ta capuche. Cet accoutrement, tu l’utilises pour paraître plus âgé. Bien évidemment la peur d’être expulsée du casino te hante chaque soir. Mais la seule raison pour laquelle ceci n’est jamais arrivé c’est ta confiance en toi, et ta maturité. Ta vivacité d’esprit et ta logique innée sont des armes indétrônables que tu t’amuses à utiliser contre tes adversaires. Cette avidité de victoire, tu la possède depuis bien des années. Tu frôles cette chose sans contour, cette chose trouble, irréaliste ; la Perfection, tu l’effleures et semble vouloir la saisir. Ta détermination te perdra-t-elle ?

Te voilà à présent devant ces majestueuses portes, celles qui te porteront vers la gloire. Ces portes ne sont que le reflet de ce qui t’attends ; un avenir orné d’or, de richesse, de diamant. Mais ceci semble te laisser indifférente. Ce que tu souhaites c’est le jeu, chaque partie te satisfait et te remplit d’une extrême réjouissance. L’excitation parfaite monte en toi dès les portes passées, et cet acte tu comptes bien le renouveler encore ce soir.  Jeune fille aux yeux de saphirs, aux cheveux d’argents, à la démarche éloquente, à la mine désabusée. Tu ne portes d’intérêt qu’à ta petite personne. Quelque peu hautaine, c’est avec ce masque que tu franchis les portes de ton destin.

La capuche ornant ton visage, seules tes fines lèvres juvéniles ne sont visibles. D’une oreille attentive tu écoutes les règles de la soirée. Apparemment, tu seras accompagnée en cette belle soirée. On t’indique ta table et tu vins y prendre place, tranquillement. Ôtant enfin cette abominable capuche, ton visage est enfin dévoilé, à la grande stupéfaction de tes adversaires qui semblent tous pouffer de rire. Tu te contentes de les ignorer, comme tu ignores l’homme qui vient de se poser à tes côtés.

Tu ne comptes pas lui adresser la parole, ni même poser ton regard sur sa personne. A quoi bon puisque tu ne le laisseras pas jouer. Non, il est hors de question pour toi de laisser jouer un homme qui te fera perdre par la suite. Seule toi est capable de gagner et tu le sais, les autres sont tous des incapables qui retourneront chez eux cette nuit, ivre mort à pleurer aux jupons de leurs femmes.

D’ailleurs le fait de t’avoir imposé un partenaire avait réussit à t’ôter toute once de satisfaction. Tu n’avais jamais joué en compagnie d’autrui depuis sa disparition. Aujourd’hui n’était donc pas un jour comme les autres. A la minute où les règles avaient été dites, ton cœur t’avait crié de renoncé aux jeux ce soir. Mais ton corps n’avait put s’avouer vaincu. Jamais tu n’aurais renoncé et ce peut importe la difficulté. Alors, autant ignorer l’existence de ton partenaire. Tu gagnerais à coup sûr ainsi.

Puis, alors que tu avais décidé de ne lui prêter aucune attention, celui-ci se mit à te parler. Quelle insolence dont il fait preuve. Le mufle. Non pas que ses paroles te blessent, elles te semblent juste fausses. Bien trop sûr de lui l’animal. C’est donc avec une expression effroyablement dure scotchée au visage que tu osas le regarder. Ces épis négligemment désordonnés, ces rubis enflammés, cette mine trop sûre de soi, ce corps juvénile, cette personne ne t’était pas inconnue. Depuis le temps que tu passais à errer  dans ce casino, tu étais presque sûre de l’avoir déjà croisé mais, impossible d’en conclure quoique ce soit alors, tu finis par lui répondre en détournant ton regard farouche vers la table.

-   N’essaies pas de me faire porter le chapeau. Si je perds ce sera uniquement de ta faute, puceau.

C’est avec un certain sarcasme que tu rajoutas ce dernier mot. Prenant le soin de bien l’articuler afin de provoquer ton interlocuteur. S’il l’était vraiment tu l’ignorais bien évidemment mais, s’il s’adressait à la toutes les femmes comme ile venait de le faire avec toi, il y avait de forte chance à ce que tu aies raison. Enfin, pas le temps d’y songer plus longtemps que l’attente fut estompée.

Il était maintenant temps de jouer. L’excitation prit de l’ampleur dans ton corps même si tu n’en montrais rien. Au fil des années tu avais appris que montrer ses sentiments à autrui ne pouvait être qu’une faiblesse. Maintenant tu attendais le top départ pour pouvoir jouer. Les cartes face à toi. Cette partie risque d’être amusante.

Les yeux rivés sur le jeu, dénués d’une quelconque once de sentiment.  Inerte. Tu sembles comme déconnectée du monde, concentrée sur les cartes et rien d’autre. Contrairement à ton partenaire, la provocation ne fait pas partie de ton mode de jeux. La chance non plus d’ailleurs. Tout est stratégique. Tu n’as pas été habituée à exploiter les sentiments humains, que ce soit quotidiennement ou dans tes jeux. Ceci te semble presque futile. D’après toi ; chaque individu représente une pièce sur un échiquier, et tel celui-ci, il doit obéir aux ordres sans réfléchir, sans en recevoir de l’humiliation ou autres ressentis.  L’Homme vit donc ainsi, dans un engrenage que lui-même a conçut. Soumit aux ordres d’autrui.  L’Homme n’est que répugnance. Arrogante créature qui part ses pulsions primaires croit détenir le pouvoir absolu, alors que celui-ci n’est qu’illusion parfaite. Et toi, toi qui éprouve une haine profonde envers ta propre espèce, tu oublies rapidement que tu agis de la même manière que tes prédécesseurs lorsque que tu tiens dans tes mains les cartes qui te mèneront à une victoire écrasante pour tes adversaires. Lorsque tu effleures celle-ci et que te viens enfin cette parfaite illusion créée par ton esprit avide de réussite, alors la béatitude du moment t’englobe dans un monde idéaliste, ce pour l’espace de quelques instants seulement, mais ces infimes secondes, tu en as besoin chaque jour. C’est ce qui te maintient en vie. C’est ce pourquoi tu redoubles d’effort à chaque tour pour éliminer le plus d’adversaire. C’est pourquoi tu élabores des stratégies toujours plus performantes. Ta raison de vivre, bien que cela soit pénible à dire.

Et alors que ta concentration est optimale, la victoire à portée de main. Ton partenaire décide finalement de jouer et prononce ces quelques paroles. Celles-ci eurent un effet dévastateur sur vos adversaires qui finirent par grommeler des injures contres vous. Ta petite personne continuait de faire la sourde oreille, et ton regard saphir se riva une énième fois vers ces cartes si envoûtantes. Alors tu en brandis une, non pas au hasard comme auraient put le croire ces soûlards, et d’un mouvement aussi vif que gracieux, tu laissas ces hommes infâmes pouvoir contempler leurs échecs et analyser leurs situations déplorables, seuls. Un fin sourire ornait maintenant tes traits. La béatitude n’était pas encore là mais, ce qui semblait te réjouir était bien plus extraordinaire. Pour la première fois depuis bien longtemps, tu étais heureuse de pouvoir gagner auprès d’un partenaire. Tu n’allais évidemment pas lui louer éloges pour le moment mais, cette nouvelle stratégie que vous veniez d’accomplir était bien plus efficace et rapide que les autres. Celle de déstabiliser son ennemi en le provoquant, pendant que l’autre cherche un moyen de gagner. Les visages anéantit des hommes face à vous témoignaient de l’impact que vous produisiez. Votre accession ne fait que commencer mais, attention à ne pas devenir aussi arrogante que l’Humanité elle-même, Yin.

Totalement obnubilée par les cartes. Tu n'entendais que vaguement les grognements incessants de tes adversaires, ou plutôt, de vos adversaires. C'était encore avec bien du mal que tu réalisais être en compagnie d'un partenaire pour jouer. A vrai dire, à part l'entendre piailler, tu ne savais trop comment qualifier sa situation dans l'équipe. Peut être était-ce son mode de fonctionnement après tout, ça semblait marcher de distraire les adversaires afin de leur dérober la victoire tel un trésor perdu. Mais tu doutais encore un peu de l'amusement que cela pouvait te produire. Tu restes éternellement muette. Poupée inerte, tu analyses toujours le jeu alors que le jeune homme à tes côtés lui, patauge dans la futile conversation de ces ivrognes dénués d'un langage convenable, qu'eux mêmes ont débuté. Il ne méritent pas ton attention. Misérable. Les insectes sont plus importants que vous pour notre écosystème.

Puis, après t'être intérieurement moquée de tes adversaires, tes songes revinrent se poser sur cet individu. C'était la première fois que tu voyais une énergumène pareille. Il était si confiant, sûr de lui. Avec une telle aisance, il était certain qu'au delà de la provocation verbale, il devait être un adversaire redoutable. Ca aurait été plus amusant de jouer contre lui, finalement. Ces deux hommes sont lassant, il sentent l'alcool et te donnent mal à la tête à cracher continuellement des noms d'oiseaux sur vous. Vous ? Tu venais de l'avouer inconsciemment. Vous formiez une équipe redoutable mais non sans faille. L'avouerais-tu un jour ?

Puis, finalement, alors que tu allais une seconde fois jouer, la foule se mêla à la horde d'ivrognes incapables, face à vous. Presque encerclée, tu es perturbée et ne semble plus apte à jouer auprès de ces gens si agités. Apparemment, la provocation devrait être mieux dosée à l'avenir. On dirait que le public demande des preuves de votre début d'ascension. Sont-ils idiots ? Il était inutile pour toi de prouver quoi que ce soit, tu étais tout bonnement plus compétente que ces misérables. Il est évident que tu as gagné sans tricherie. Tu n'as même pas eu besoin de te creuser l'esprit ou d'user de ton intelligence pour leurs souligner leur infâme défaite. L'incompétence et l'orgueil démesuré de ces piètres hommes ne font qu'accroître ta migraine naissante. Tu portes alors une main à ton front, ton gracieux visage se déformant de douleur. C'en était continuellement progressif et le seuil du supportable serait bientôt franchit. Tu n'eus pu que laisser négligemment tomber ta tête sur l'épaule de ton partenaire. Une faible plainte témoignant de ta détresse face à cette foule endiablée quémandant un duel comme si vous étiez des bêtes de cirques.

- J'ai mal à la tête... Sortons.